Molière, le spectacle musical
Livret : Dove ATTIA et François CHOUQUET
Mise en scène : Ladislas CHOLLAT assisté d’Eric SUPPLY
Musiques : NC
Paroles : NC
Direction Musicale : Dove ATTIA
Scénographe : Emmanuelle FAVRE
Chorégraphie : Romain RACHLINE BORGEAUD assisté de Geoffroy GOUTORBE
Lumières : Dimitri VASSILIU
Création sonore : Stéphane PLISSON
Costumes : Jean-Daniel VUILLERMOZ
Vidéos : Guillaume AUFAURE et Peggy MOULAIRE
Maquillages et coiffures : Catherine SAINT-SEVER
Avec :
Arezki AIT AMOU, David ALEXIS, Théa ANCEAU, Abi BERNADOTH, Enzo BOUNICHOU, Justine CASPAR, Romane CHANEY, Vincent CORDIER, David DAX, Tessa EGGER, Joanne GRACIA Y GRACIA, Maïa GIRARD, Lou, Jérémy MARQUET, Marc MAURILLE, Audrey MORIBATO, Antoine NYA, Anthony PACCOUD, Coline PERROCHEAU, Morgan, PETiTOM, Shaïna PRONZOLA, Camille ROCHER, Basile SOMMERMEYER et Vike
Au Dôme de Paris jusqu’au 18 février 2024
puis en tournée du 2 mars au 12 octobre 2024
Pour être tout à fait honnête, lors de notre venue à la générale de presse du 16 novembre, nous n’avions pas été tout à fait emballé. Certains qui nous lisent savent que lorsqu’on n’écrit pas sur un show, c’est qu’on ne s’attarde pas à en parler. Mais pour Molière le spectacle musical, on avait le sentiment de passer à côté de quelque chose. C’est donc à deux rédacteurs pointilleux que nous sommes retournés applaudir ce spectacle. Nous aurions eu tort de ne pas le faire pour une critique qui nous a donné beaucoup de fil à retordre.
D’abord, il faut passer outre le fait que Molière le spectacle musical s’inspire (le mot est faible) du chef d’œuvre de Lin-Manuel MIRANDA, Hamilton. Que ce soit du décor jusque dans le parquet à l’identité visuelle et musicale du show, on sent l’empreinte du spectacle aux 11 Tony Awards dont celui de la meilleure comédie musicale en 2016. Toutefois, n’est pas Hamilton qui veut. Soulignons toutefois que Dove ATTIA ne se cache pas d’avoir voulu sa version de ce spectacle musical, bien au contraire, il le clame haut et fort.
Après une introduction faite de crieurs coincés entre deux époques, le show démarre sur un visuel qui nous met « sur le cul » ! On ne peut qu’être bluffé par la scénographie et la lumière de cette entrée en matière. Soulignons que la lumière du spectacle est ultra léchée, elle habille les scènes superbement. Notons également que l’utilisation d’un écran n’a, cette fois, rien de rédhibitoire. Elle met l’accent sur des images à l’aspect de gravures du plus bel effet. Les passerelles mobiles, déjà vues sur les précédentes productions de Dove ATTIA dans Les Dix Commandements ou Le Roi Soleil sont toujours efficaces. D’ailleurs, bien des fois, on pense assister à un best of des comédies musicales du producteur et ce n’est pas un mal. Enfin, le recours à des miroirs ingénieusement orientés donnent une dimension de profondeur et de perspectives impressionnantes.
Passé un premier acte où les moments réussis sont presqu’amenuisés par un livret fade et faiblard au point qu’on a tendance à s’y perdre et dans lequel l’émotion manque cruellement. Le deuxième acte est lui beaucoup plus fluide et amène coup sur coup des titres aux paroles bien écrites entrecoupés de rimes et proses élaborées. La musique est efficace radiophoniquement bien que quelques maladresses en termes d’orchestrations soient à noter. Un directeur musical avec une formation de chef d’orchestre aurait éviter de pécher par excès de confiance et aurait su insuffler une palette de couleurs plus large sur la partition. Mais là où le directeur musical ne se trompe pas, c’est sur ces capacités de producteur à nous attraper dans un rythme qui détonne ! On ressort avec les titres en tête. Il est évident qu’il y a une volonté à séduire un public le plus large possible, des fans de musicals aux fans de variété en passant par les inconditionnels du poste de télévision. Point de rap ou de RnB uniquement, les titres sont résolument pop. On pense à Shy’M, Claudio CAPEO ou encore Mentissa… Notons qu’on aurait préféré ne pas entendre les titres de l’album avant le début du spectacle ou pendant l’entracte mais les découvrir dans leur contexte.
Pour rester dans la musique, on apprécie un fait rare sur les spectacles musicaux, le fait d’ « underscorer » la narration ! C’est fait avec talent et justement proportionné. Dommage que ce même livret apporte, encore dans ce genre de production, le personnage comique à l’excès dans un parlé qui se voudrait urbain mais qui est daté. On aurait presque préféré, en clin d’œil au Roi Soleil, le retour anecdotique d’Emmanuel MOIRE/Christophe MAE dans leur rôle. Fort heureusement, d’autres personnages du livret effacent ce nauséeux Monsieur le frère du roi. Ainsi, on a une vraie bonne idée du personnage de l’habilleuse forte d’une légèreté en opposition avec ce qu’elle représente (on ne spoilera pas davantage sur celle-ci).
Côté talent, on n’est pas en reste. Le casting est signé Bruno BERBERES. La plupart des premiers rôles excellent dans les performances tant vocales que physiques. Quelques seconds rôles montrent des difficultés sur des disciplines qui ne sont pas les leurs : la comédie pour certains, le slam pour d’autres. Car le slam ne se cantonne pas à réciter un texte sur de la musique. Si effectivement, il est dépourvu de notes de musiques, il n’est pas dépourvu de musicalité sur les sonorités et encore moins sur le tempo. Certains l’ont compris, tel David ALEXIS qui se prête à l’exercice avec brio. Idem pour tous les premiers rôles. Même si c’est Basile SOMMERMEYER qui tire son épingle du jeu en la matière. On reste effaré par les aigus sublimes d’Abi BERNADOTH. Il intègre ces notes hautes aux sombres dessins de l’insidieux mais non moins charismatique Prince de Conti. On se laisse envahir par les fêlures de Vike. On est en admiration face à Shaïna PROZONLA et ses graves hallucinants. Face à tant de talents, on regrette que la production ait pris le parti d’une bande enregistrée pour la musique et les voix additionnelles. On aurait préféré un 100% live comme à Broadway.
Celui dont on n’a pas encore parlé, et pourtant pas des moindres est PETiTOM. Encore un talent qui nous vient du Québec. Petit par la taille, peut-être, mais certainement pas par son talent. Il a plus d’une corde à son arc et décoche chacune de ses flèches droit sur sa cible. Chant, Slam, danse, acrobaties et aussi comédie, tout est maîtrisé. Voilà un premier rôle qui prend sa place à cœur tout en entrainant le reste de la troupe dans son énergie. Un point qui nous fait dire, sans honte, que ce changement de casting survenu tardivement dans le processus de création est une excellente chose. Il nous offre des performances dingues. En revanche, c’est dans les duos qu’on le préfère. Pour exemple, le duo avec Lou dans « En aparté » et surtout le duo père-fils avec un David ALEXIS, lui aussi, au sommet.
Abordons maintenant la danse. Romain RB s’inspire grandement de son succès Stories dans des chorégraphies où les corps passent de presque ramassés à une élongation à mi-chemin entre force et volupté. Des saccades graciles savamment exécutées pour ne pas tomber dans l’effet inverse que celui voulu. La troupe de danseurs et danseuses apporte une lumière supplémentaire à l’œuvre tant ils rayonnent. Cette pose sophistiquée qu’ils prennent sur la fin du titre, devrait-on dire le tube de Shaïna PROZONLA Moi je veux en est l’illustration. D’une beauté sans faille à l’image du tableau. Si notre coup de cœur sur les rôles chantés va à PETiTOM, c’est à Jérémy MARQUET que ce coup de cœur revient pour l’ensemble. Un ensemble qui ne se contente pas uniquement de danser mais qui est intégré à la narration par des rôles de figurants ayant la lourde tâche de procéder au changement de décors avec fluidité.
Une autre bonne chose est l’intégration par ci par là de répliques du « patron ». On aime à entendre Le bourgeois gentilhomme, Le tartuffe ou l’imposteur mais surtout L’école des femmes. On attendait PETiTOM et Lou au tournant sur cette partie casse-gueule entre Agnès et Arnolphe. Ils s’en tirent plus qu’haut la main !
Pour conclure, le show s’achève sur un final, rappelant Edmond d’Alexis MICHALIK et Mozart L’Opéra Rock avec une envolée lyrique de Théa ANCEAU, qui ne laissera pas indifférent et qui apporte la dose d’émotion qui avait manqué.
Si Molière le spectacle musical souffre quelques fautes techniques et artistiques. Il mérite bien, malgré tout, sa place cette saison parmi les meilleurs spectacles musicaux ! Il serait dommage de ne pas s’y attarder tant l’ensemble reste plus qu’honorable. Ce n’est pas encore Broadway mais on s’en approche. Preuve qu’en France, on peut encore sortir des œuvres classiques et proposer de nouvelles perspectives.
L’histoire
Le spectacle relate l’histoire extraordinaire d’un homme qui renonce au confort matériel et au prestige de la charge de Tapissier du Roi pour créer, aux côtés de la femme qu’il aime, une troupe de théâtre.
La route vers le succès sera longue et les obstacles nombreux : Molière paiera très cher le prix de la liberté et devra affronter l’hypocrisie et l’adversité de ses nombreux ennemis.
Il deviendra néanmoins un auteur libre qui va révolutionner l’écriture de la comédie.
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BILLETTERIE
Rémi et Aurélien.