Samson (Critique)

Samson

de : Jean-Philippe RAMEAU
Livret : Voltaire
Direction musicale : Raphaël PICHON
Mise en scène : Claus GUTH
Scénographie : Étienne PLUSS
Costumes : Ursula KUDRNA
Dramaturgie : Yvonne GEBAUER
Lumières et création vidéo : Bertrand COUDERC
Chorégraphie : Sommer ULRICKSON
Son : Mathis NITSCHKE
Collaboration à l’écriture : Eddy GARAUDEL
Reprise de la mise en scène : Romain GILBERT
Assistant à la direction musicale: Sammy EL GHADAB Artiste de l’Académie
Reprise de la chorégraphie : Gal FEFFERMAN
Assistante costumes : Coline PRIVAT
Assistant lumières : Gilles BOTTACCHI
Coordinatrice d’intimité : Sara BRODIE
Directeur d’études musicales : Pierre GALLON

Avec :
Jarrett OTT, Ana Maria LABIN, Julie ROSET, Mirco PALAZZI, Laurence KILSBY, Camille CHOPIN, Richard PITTSINGER, René RAMOS, Andrea FERREOL, Pascal LIFSCHUTZ, Léon PROST ou Isaac MUNIESA,
Krausz Theo EMIL, Gal FEFFERMAN, Victoria McCONNELL, Manuel MEZA, Rouven PABST, Francesco PACELLI, Dan PELLEG, Marion PLANTEY, Robin ROHRMANN, Victor VILLARREAL, Marko WEIGERT, Alexandre CHARLET, Adrian CONQUET , Philippe GOUMAS, Hugo COLLIN

Choeur et Orchestre : Ensemble Pygmalion

Et avec les enfants de la Maîtrise Populaire de l’Opéra-Comique – en alternance

A L’opera Comique

Jusqu’au 23 Mars 2025

C’est encore une jolie proposition que fait l’Opéra Comique avec cette version de Samson.

Ici, l’œuvre mêle habillement chant, musique, jeu parlé, danse avec pour chaque spécialité intrinsèquement liée aux autres un niveau très élévé. Dès les premières notes jouées par l’orchestre, on est pris d’une très agréable confusion sensorielle. Elle est, presque immédiatement confirmée par le chant entonné par le chœur. On frisonne devant tant d’application, tant de beauté dans l’écriture de la partition. Des siècles après sa composition, elle sonne toujours avec modernité. Jean-Philippe RAMEAU, en avance sur son époque ? A n’en pas douter oui mais c’est aussi le directeur musical, Raphaël PICHON , qui a su insuffler cette vigueur à la partition. Une partition qui se révèle, du fait de la censure que le livret de Samson écrit par Voltaire avait subi à l’époque, être un patchwork d’opéras divers et variés. C’est sûrement cette singularité qui fait que chaque morceau est très contrasté.

Jarrett OTT, dans le rôle de Samson, incarne la force bien au-delà encore que dans le lyrisme. Tout chez lui révèle la puissance de son personnage. Il est sur scène accompagné de deux de ses amours, Timna et Dalila, respectivement , Julie ROSET et Ana Maria LABIN, elles aussi, impressionnantes par leur voix. Ana Maria LABIN se pose en parfaite tragédienne. Elle se permet un écart heureux quand elle disgresse de la partition pour donner une syllabe plus théâtrale. Tous les artistes sur scène offrent une interprétation enlevée jusqu’aux combats chorégraphiés d’un esthétisme, d’un graphisme ahurissants.

Pour renforcer la dramaturgie de l’histoire, la mise en scène est audacieuse et sophistiquée. Claus GUTH a pris le parti de donner l’action dans un lieu plus comtemporain que le palais à colonnades présenté dans la Bible. On est sans cesse face à des tableaux qui portent bien leur nom, tant, ils semble tout droit empruntés à des toiles exposées au musée. On notera, d’ailleurs, un rappel à la cène comme un pied de nez à la censure religieuse de l’œuvre lyrique de Voltaire et aux récents débats que suscite la prétendue reprise du repas des Dieux dans diverses manifestations artistiques.

Un autre coup de génie dont on se fera témoin, c’est que la scénographie relève tantôt du réalisme tantôt de la science-fiction. Il joue avec les lieux et les époques mais aussi avec la lumière qui devient un élément de narration à part entière. Pour renforcer encore ce jeu sur le temps, l’espace et ce flirt avec la science-fiction, chaque drame sanglant se ponctue d’un rideau virtuel (à voir pour comprendre) agissant comme un curseur sur un écran qui ferait redescendre la tension. On retrouve ce curseur sous d’autres formes pour une lecture qui replace le contexte dans une chronologie décalée. On notera aussi que la scène s’offre, avant la représentation, à la vue du public. Celui-ci étant déjà face au drame qui s’est produit. Quand ? Comment ? Des clés seront données, d’autres seront à inventer.

Raphaël PICHON et Claus GUTH font de ce Samson un opéra qui bouscule et innove en maintenant les origines de la création. C’est fantasmagorique !


L’histoire

On connaît la force surhumaine de Samson et sa passion fatale pour Dalila. Mais Samson, c’est aussi une naissance annoncée par un ange, une élection divine qui fait de lui un libérateur et un juge. Et c’est encore l’impossible maîtrise de soi, l’aveuglement au propre comme au figuré, les écueils amoureux. Le héros est marqué par la fatalité.

Sur ce personnage issu du Livre des Juges, Voltaire ambitionnait d’offrir à Rameau un livret d’opéra plus philosophique qu’académique. Mais les censeurs royaux refusèrent de voir l’histoire sainte traînée sur la scène profane. Rameau renonça donc et recycla sa partition dans ses œuvres ultérieures.

S’il ne peut être reconstitué à la lettre, ce projet de 1734 inspire à Claus Guth et Raphaël Pichon une perspective plus large et plus collective. Sur un scénario parcourant la vie du héros s’ajuste un montage musical idéal, aussi proche que possible de l’original. Avec une intrigue simple et forte, ce spectacle total conjugue des musiques saisissantes et restitue pour le public d’aujourd’hui le tragique édifiant rêvé par Voltaire.

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Aurélien

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